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Bartolomeo in cristu - Dédicace - Stefanu Cesari

Bartolomeo in cristu - Dédicace - Stefanu Cesari
Le Mercredi 14 Novembre 2018
4 Rue Emmanuel Arène, 20000 Ajaccio
 Catégories: Livres & Dédicaces

Mercredi 14 novembre 2018 - 17h - Librairie La Marge - Ajaccio

Stefanu Cesari dédicacera son dernier ouvrage, « Bartolomeo in cristu », à la librairie La Marge à Ajaccio

Bartolomeo in cristu de Stefanu Cesari n’est pas un livre ordinaire que l’on range dans sa bibliothèque après la lecture. C’est un objet que l’on veut garder près de soi, comme un recueil de prières et l’esthétique de ce livre, minutieusement conçu par les Éditions Éoliennes, se prête à la comparaison : 59 poèmes en corse avec leur traduction que l’on pourrait faire glisser sans fin entre les doigts comme les perles d’un rosaire et un 60ème qui longe à l’envers le bord inférieur des pages, nous incitant à relire, relier, poursuivre…

Stefanu propose une découpe régulière du texte, essentielle. Les poèmes sont répartis comme des blocs de pierre qu’il aurait taillés, ainsi la forme pèse autant que le temps. On notera comme toujours chez l’auteur, la volonté du mot juste, la recherche du rythme parfait, de la sonorité exacte, et en particulier dans ce recueil, cette façon qu’il a de matérialiser certains ressentis. Ceux qui sont liés à la mémoire remontent avec une épaisseur palpable, la plume du poète en fait du sable, de l’eau, du gravier de la chaux… il met de l’âge dans le souvenir, tandis que l’écriture se fait éthérée quand elle dit l’inconnu, la respiration, les vapeurs lumineuses de ce qui est en devenir. On ne sait par quelle alchimie, les mots sécrètent alors de mystérieuses substances spiritueuses. L’auteur a donc ce pouvoir de nous faire sentir par la langue, la lente altération des choses et des êtres. Au sein de l’écriture, le sol enlace le ciel et le poème bascule dans un tournoiement sans prise.

Cette tension entre advenu et advenir palpite au coeur d’un pays entre deux arbres, qui est aussi un espace temps maturant. Hommes et bêtes s’exercent à verticaliser ce lieu, s’agitant indéfiniment et durement comme sur la scène d’un théâtre, dans une sorte de circonvolution répétitive, à l’image de la végétation qui les entoure : « On y naît on y meurt les mères y ont une myriade de fils qui courent après leurs pères, c’est ainsi, tout se dresse comme un signe âpre, un pourquoi qui n’est pas une question… »

Le sol ici remué trouve une force de mouvement, il vibre au rythme des jours, des nuits, des saisons. Les générations successives y ont laissé leurs traces en couches superposées, une histoire, des pierres taillées, un chantier à finir qui renforce la mémoire et le respect de la transmission. Une communauté de nature est donc évoquée entre l’homme et le pays dans lequel il vit, oeuvre, meurt, réglé par une organisation harmonieuse, terreuse et solidaire : « le travail quand il est fait attend qu’un autre homme fasse le sien ».

Toutefois, derrière l’inertie apparente de ces tableaux de vie se joue en filigrane une certaine thématique de l'ouvert et du fermé de laquelle émane un mystère. Une trace ouverte traverse ce monde clos, suggérée notamment par les mouvements de la transhumance pastorale. On perçoit la transparence d’« une voie, » d’une « fenêtre du temps » effleurée par les « allers-retours » des oiseaux et des enfants aussi, dont « les yeux sont pour le ciel ». Nous ajouterons à ces images de l’ouvert la mystérieuse « chanson » : « lumière d’un autre royaume » et l’amanderaie, puisque le poète précise : « L'amande c'est la peau dure qu’il faudrait passer, » incitant le lecteur à cheminer du visible à l’invisible, à travers l’imprévisible. Dans la matière se déchire donc un chemin de ciel, la soif d’une longue marche sèche, une voie hasardeuse et fascinante qu’il faudra affronter pour ne pas s’enliser dans le réel dense et humide du passé.

La lumière de ces signes n’est peut-être pas vraiment perçue par les habitants de ce pays, trop occupés à leurs tâches, mais il se pourrait qu’elle se fonde à leur insu en leur être comme une force d’action. Elle transparaît en tous cas dans la matière du poème comme la remontée de l’origine au sein du temps pour esquisser le visage de l’éternité. Ainsi on oserait presque dire que le recueil de Stefanu prend des allures de Saint Suaire.

Le passage dans le texte de cette organisation terrestre au cosmos se fait de manière plus évidente par la présence insolite et lumineuse de l’image de Bartolomeo, personnage central et étranger au pays. Sa silhouette qu’on dirait à moitié vivante, immobile et active, nue, « in cristu », faite, défaite, refaite de plusieurs couches où le rouge domine, se détache d’une fresque de la chapelle de San Parteo-Gavignano.

La contemplation de ce Saint, nous dit Stefanu, a été le point de départ de l’écriture. Parce que le poète sait bien la réciprocité du regard, son imagination va faire alors de ce Saint le gardien aux « pupilles blanches comme des couteaux ouverts », qui veille sur le lieu. Le premier sens de con-templare, n’est-ce pas tracer le sillon délimitant l’espace sacré du temple ? Cette tâche revient à Bartolomeo, bar-tolmay en hébreu, littéralement, le fils du sillon. C’est lui le maître d’œuvre : « l’esprit du lieu » dira le poète.

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